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"Predict’Air, nouvel indicateur de la qualité de l’air”

Valider la pertinence d’un indicateur d’exposition sanitaire, le Potentiel Oxydant des particules atmosphériques

La pollution atmosphérique est une préoccupation majeure pour la santé publique. Les indicateurs actuels PM10 et PM2.5, basés sur la masse des particules décrivent mal l’impact sanitaire à court terme. Gaëlle Uzu, directrice de recherche IRD à l'Institut des Géosciences de l'Environnement (UGA, CNRS, IRD, G-INP) propose un indicateur complémentaire, le Potentiel Oxydant.

La pollution aux particules

La qualité de l’air est un enjeu majeur de santé publique. Des études épidémiologiques ont établi que les maladies chroniques résultant de la pollution de l'air sont majoritairement dues aux particules. La réglementation actuellement en vigueur en Europe utilise la concentration massique des matières particulaires (PM-Particulate Matter) comme indicateur et outil d’alerte sanitaire et n’intègre pas les déterminants majeurs de la toxicité des particules (composition, taille, solubilité, surface spécifique, spéciation chimique). Or, la majeure partie de la masse des particules ambiantes est constituée de composants de faible toxicité alors que les substances nocives ne représentent qu’un très faible pourcentage massique. Un nouvel indicateur représentatif de l’impact sanitaire n’est-il pas nécessaire pour nous alerter ?

→ A l’échelle de la France, l’impact d’une mauvaise qualité de l’air est estimé à 40 000 décès prématurés par an en 2020.*

Une métrique sanitaire complémentaire

La chaire Predict’air participe aux recherches visant à démontrer la pertinence du Potentiel Oxydant (PO) des particules comme nouvel indicateur de l’exposition sanitaire. L’objectif est de proposer le PO comme nouvelle mesure réglementaire de la qualité de l’air en Europe.  Cette nouvelle métrique permettrait de ne considérer que les polluants ayant un impact sur la santé.

G. Uzu propose, avec la Station du Futur, de développer un projet autour de mesures automatiques en temps quasi-réel du Potentiel Oxydant et d’autres mesures chimiques en ligne. 

L’apport de la station sera de démontrer la faisabilité de ce concept à Grenoble, ville à la topographie complexe impactée par des épisodes de pollutions hivernaux.

La station du futur

Il est nécessaire de compléter les premières études réalisées qui visaient à montrer la relation entre les valeurs du potentiel oxydant des particules dans l’air et les effets sur la santé.

De façon plus spécifique, la chaire Predict’air avec la Station du Futur souhaite supporter le développement des mesures en laboratoire, ainsi que la science consolidant les relations entre Potentiel Oxydant, sources d’émissions de particules et impact sanitaire.

La Station du futur met en oeuvre une plateforme inédite d’équipements pour :

  • prendre en compte l’exposition sanitaire dans la mesure de la qualité de l’air
  • identifier en temps réel les sources responsables de la qualité de l’air
  • étudier l'impact des réglementations actuelles et proposer des scénarios

Pour cela, l’équipe de Gaëlle Uzu propose de :

  • Déployer et faire fonctionner en parallèle différents appareils de mesures en ligne à la station de mesure de référence de qualité de l’air de Grenoble-Les Frênes.
  • Développer une nouvelle méthode de traitement des données en ligne provenant de plusieurs instruments, afin d’attribuer à chaque source de particules émises dans l’atmosphère sa part d’impact sanitaire.
  • Croiser les données avec des études épidémiologiques dans le bassin de Grenoble et à La Paz en Bolivie où l’IGE gère un observatoire atmosphérique.

Aller plus loin

Mais qu’est ce que le Potentiel Oxydant ? 

C’est une métrique définie comme la capacité des particules à induire la formation d’espèces oxydantes dans le milieu pulmonaire et donc à susciter des réactions d’oxydation à l’origine d’effets délétères pour l’organisme. Cette mesure intègre des propriétés des particules (taille, composition chimique, surface active…) reliées au stress oxydant (dommages causés par des radicaux libres) qu’elles peuvent générer dans le système respiratoire.

En effet des études de processus in vitro ont montré que les effets sanitaires des particules atmosphériques sont principalement attribués à leur potentiel inflammatoire via les espèces oxydantes qu’elles véhiculent, comme des métaux et des molécules organiques.

Les maladies déclenchées diffèrent selon les mélanges spécifiques des différentes sources de pollution, la durée d’exposition et la susceptibilité des personnes. Mais l’origine commune de ces affections respiratoires est attribuée au stress oxydatif pulmonaire engendré par l’exposition aux particules. Au niveau biologique, le stress oxydatif peut être défini par un excès non contrôlé de radicaux dérivés de l’oxygène (ROS dits aussi radicaux libres) ou de l’azote (RNS). Cet excès de ROS ou RNS peut endommager les cellules, induire une réponse inflammatoire, et plus généralement bouleverser l’équilibre métabolique des cellules. Ce mécanisme biologique est à l’origine de nombreuses pathologies cardio-respiratoires qui surviennent lorsque l’on est exposé à la pollution de l’air telles que l’asthme, les bronchites ou certains cancers. Ce stress s’exprime si la production d’espèces oxydantes dépasse les mécanismes antioxydants censés limiter leur présence.

Ce que fait la Fondation Air Liquide

Depuis 2019, la Fondation a financé à hauteur de 420 000 € le projet Predict’Air qui se propose de valider la pertinence du Potentiel Oxydant (PO) comme la future mesure de la qualité de l’air en Europe. Un comité de suivi comprenant notamment la Fondation Air Liquide et les parrains / marraines se réunit annuellement afin de suivre l’avancement de la recherche.

Interview de Gaëlle Uzu : Peut-on contrôler l'air que l'on respire ?

Témoignage

“La pollution de l’air, et notamment le nombre de particules,  a des impacts directs sur la santé mais il n’est pas encore bien établi quelle caractéristique est prépondérante entre la composition chimique, la taille ou le pouvoir oxydant. Ce projet permettra d’apporter de nombreuses données comparatives indispensables pour pouvoir mieux comprendre les mécanismes mis en jeu et donc définir les futures stations de mesure de la qualité d’air. “

Martine Carré, Scientific Director in Analytical Sciences, International Fellow

Fondation Université Grenoble Alpes